Que ce soit pour purifier l’air intérieur ou renforcer ses protections contre le coronavirus, inutile de se fier aux remèdes naturels (huiles essentielles, compléments alimentaires, etc.). Même s’ils sont activement promus, ils n’ont pas fait leurs preuves.
En période de pandémie, la crainte d’être contaminé par le coronavirus SARS-Cov-2 est grande. Certains vendeurs d’huiles essentielles, compléments alimentaires et autres probiotiques ont profité de l’aubaine pour proposer leurs différents produits censés renforcer les défenses immunitaires, aider à gérer le stress ou encore purifier l’intérieur. Certaines pharmacies elles-mêmes se livrent à de telles pratiques (voir photo ci-dessous). Faut-il croire à cette communication qui cible le confinement et l’épidémie de Covid-19 ?
« Booster les défenses immunitaires »
Plusieurs marques prétendent que leurs produits peuvent « soutenir les défenses naturelles de l’organisme » grâce à l’apport d’extraits de plantes et de probiotiques. Elles s’appuient sur cet argument phare : 60 à 70 % des cellules immunitaires de l’organisme se situent dans l’intestin. En aidant le microbiote, « gardien de l’immunité », il serait donc possible de renforcer l’immunité naturelle.
Si ce nombre n’est pas faux, l’argument santé est fallacieux. Il est vrai que notre système digestif est composé en partie d’un tissu lymphoïde. Celui-ci participe aux défenses immunitaires, notamment parce qu’il stocke des cellules comme les lymphocytes, chargées de nous défendre face aux virus ou bactéries. Mais il est difficile d’affirmer que des plantes ou probiotiques stimulent cette immunité. D’abord car on connaît mal l’impact du microbiote sur ce système. Ensuite car il y a peu de preuves de l’efficacité des probiotiques, comme nous l’expliquions récemment. De même, on ne peut pas affirmer que les plantes soutiennent le système immunitaire : cela n’a pas été prouvé.
« Des antibiotiques naturels »
Certaines plantes (pamplemousse, échinacée, etc.), disponibles sous forme de complément alimentaire ou d’huile essentielle, sont décrites alternativement comme des « antibiotiques naturels » et des « antiviraux ». Ça n’est pas tout à fait la même chose, soulignons-le : un antibiotique lutte contre une bactérie, un antiviral contre un virus. L’échinacée a montré un petit effet contre certains virus. Un médicament contenant cette plante est autorisé en France contre le rhume. Mais il est peu efficace, il réduit les symptômes d’une journée seulement.
Quant au pamplemousse, les marques que nous avons contactées nous ont fourni une maigre documentation. Il s’avère qu’aucune étude sérieuse chez l’humain ne valide cette affirmation. Seuls des essais sur des cellules ont livré des résultats. Rappelons également que le pamplemousse doit être pris avec précaution si des médicaments sont pris au long cours car il peut limiter leur efficacité.
Enfin, sur son site, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) souligne que « les huiles essentielles ne constituent pas un moyen de lutte contre le coronavirus » et que ces produits ne doivent pas être utilisés dans certains cas (asthme et autres maladies respiratoires, grossesse ou allaitement, jeunes enfants).
« Purifier l’air intérieur »
Dernière utilisation douteuse conseillée « en période de confinement » : la diffusion ou la pulvérisation d’huiles essentielles dans le domicile. « L’intérêt de leur utilisation est basé sur leurs propriétés olfactives et l’effet purifiant de certains composants sur l’air ambiant », nous affirme une attachée de presse représentant Naturactive. On peut en douter. Loin de purifier l’air intérieur, les sprays ont tendance à le charger en composés organiques volatils (COV) comme l’ont montré nos tests et une étude de l’Agence de la transition écologique (Ademe). Cette pratique peut, par ailleurs, comporter un risque pour les personnes souffrant d’asthme, rappelle l’Anses. Le meilleur moyen d’assainir son intérieur reste d’aérer le logement pendant 10 minutes, chaque jour.
Et le gel hydroalcoolique ?
À défaut de gel hydroalcoolique disponible en pharmacie, Aroma Zone propose une version maison, à faire soi-même. L’huile essentielle de Tea Tree y est présente pour ses « propriétés purifiantes ». Mais le principal acteur désinfectant, c’est l’alcool présent dans la « base parfum ». On obtient un gel concentré à 66 % en alcool végétal biologique (Alcohol denat). La concentration correspond à celle souhaitée par l’Agence de sécurité du médicament (entre 60 et 70 %) mais pas à celle conseillée par l’OMS dans sa recette pour les pharmaciens. Par ailleurs, l’alcool utilisé n’est pas conforme à ceux exigés par l’ANSM (éthanol, n-propanol ou isopropanol). Si vous disposez d’un robinet, mieux vaut donc vous laver les mains à l’eau et au savon, pendant 20 à 30 secondes.
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Audrey Vaugrente