L’activité des notaires est loin d’avoir cessé avec le confinement. La mise en place dès fin mars par le Conseil supérieur du notariat de solutions techniques, puis l’adoption par le gouvernement du décret d’exception du 3 avril 2020, permettent aujourd’hui d’effectuer à distance la plupart des actes notariés.
Si de nombreuses études notariales ont fermé leurs portes en raison de l’épidémie de Covid-19, cela ne signifie pas que les agents ne travaillent pas et ne peuvent être joints. La mise en place du confinement a accéléré les réflexions des notaires sur la signature des actes à distance. Dès le 25 mars 2020, le Conseil supérieur du notariat (CSN) a précisé dans une note d’information que certains actes pouvaient désormais être réalisés à distance via la procuration électronique. Le décret n° 2020-395 du 3 avril 2020 pris par le gouvernement a étendu à l’ensemble des actes notariés, y compris les plus solennels, la possibilité de signer électroniquement à distance tous les types d’actes. Ainsi, en principe, 100 % des documents notariés peuvent aujourd’hui être conclus sans bouger de chez soi.
Deux types d’actes
La pratique doit être légèrement nuancée. Pour commencer parce que tous les offices notariaux ne sont pas encore équipés électroniquement. D’autant qu’il existe deux techniques différentes, selon le niveau de solennité de l’acte : l’acte signé par procuration électronique et l’acte authentique électronique (AAE) nécessitant une authentification renforcée. Or cette dernière est techniquement beaucoup plus complexe. C’est ce second type d’acte qui vient d’être autorisé par le décret du 3 avril. Attention : l’AAE ne pourra être utilisé que pendant la crise actuelle, c’est-à-dire jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de la cessation de l’état d’urgence sanitaire.
Acte signé via une procuration électronique
Cette technique est la plus simple à mettre en place. Elle pourra en outre perdurer même après la levée du confinement. Chaque partie signe de son côté une procuration numérique via une plateforme sécurisée et agréée par le conseil supérieur du notariat (via l’envoi de mails sécurisés, l’utilisation d’un code ou validation par SMS, etc.). Un collaborateur du notaire doit être présent à l’étude pour recevoir leur mandat et les représenter à l’acte. Les actes concernés sont principalement les ventes immobilières et les actes de succession. Ainsi les compromis ou promesses de vente immobilière, tout comme les actes définitifs de vente, peuvent être signés à distance par ce biais. Même chose, s’agissant des successions, des différents actes (acte de notoriété, attestation de propriété et déclaration de succession). Jean-François Humbert, le président du Conseil supérieur du notariat (CSN), précise : « J’insiste bien sur le fait que ces actes présenteront la même sécurité juridique que les autres et ne pourront être remis en cause plus tard. » Notons qu’en pratique, s’agissant des ventes immobilières, ce sont essentiellement les procédures déjà en cours qui pourront être menées à terme (les banques se sont engagées à respecter les accords de principe donnés avant le confinement, même si l’on constate un peu de retard dans l’édition des offres). Mais ne serait-ce que pour la visite des biens, les nouveaux projets présentent en revanche, en période de confinement, une toute autre complexité qui dépasse la question de la signature de l’acte notarié.
Acte authentique électronique
Il s’agit des actes les plus solennels : vente en l’état futur d’achèvement, testament authentique, donation, changement de régime matrimonial, partage après divorce, reconnaissance d’enfant… « En principe ces actes ne peuvent être conclus sans la comparution physique des parties devant le notaire. À titre d’exception, le décret d’exception du 3 avril 2020 autorise, pendant la période d’urgence sanitaire rallongée d’un mois, que le notaire reçoive seul et à distance le consentement des parties à l’acte. Mais sous condition de mise en place de dispositifs d’authentification et de sécurisation très renforcés des échanges numériques », détaille Nathalie Couzigou-Suhas, notaire à Paris. En pratique, une visioconférence (via un dispositif agréé par le CSN) doit être organisée pour permettre la comparution simultanée à distance de toutes les parties devant le notaire. Mais auparavant, l’identité des clients devra être certifiée via un système d’authentification renforcée (les démarches des particuliers doivent être faites sur une plateforme là aussi agréée par le CSN). À l’issue de la visioconférence, le notaire fera parvenir, par voie numérique sécurisée, une attestation de confirmation de consentement que chaque partie signera électroniquement (toujours via une procédure sécurisée établie par le prestataire agréé). Enfin, dernière étape : le notaire signe seul l’acte au moyen d’une clé numérique (dite REAL) qui procure à l’acte son authenticité.
À noter. Le 3620 est le numéro mis en place par les notaires de France pour répondre aux interrogations des particuliers dans le contexte actuel.
Les prestataires agréés pour la signature sécurisée et la visioconférence
Les prestataires aujourd’hui agréés par le CSN pour mettre en place des dispositifs de signature sécurisée, dite « avancée », sont au nombre de cinq :
- DocuSign France
- CertEurope
- ChamberSign France
- Universign
- Yousign
Il n’existe aujourd’hui qu’un seul prestataire agréé par le CSN pour le système de visioconférence : Lifesize.
Élisa Oudin