Alors que les placements classiques, bancaires ou assurantiels peinent à offrir des rendements satisfaisants, de nombreux épargnants, même les plus prudents, se laissent séduire par l’univers alléchant des cryptoactifs. Promesses de gains rapides, discours rassurants sur la sécurité, influenceurs omniprésents… La tentation est forte, mais les risques, eux, bien réels.
🔹 Crypto : entre illusion de richesse et réalité juridique
Le discours marketing est bien rôdé : success stories scénarisées, publicités omniprésentes, témoignages enjolivés… Pourtant, derrière cet emballage doré se cache un univers sans régulation réelle, où de nombreux investisseurs sont piégés. Arnaques organisées, pertes financières majeures, escroqueries massives : le consommateur est souvent victime plutôt qu’acteur.
🔹 Quand la justice s’en mêle : quelle responsabilité pour les banques ?
Face à cette multiplication d’affaires, les tribunaux commencent à trancher. Plusieurs décisions favorables ont vu le jour, mettant en lumière une possible responsabilité des banques en cas de manquement à leur devoir de vigilance.
Dans certaines situations, les juges ont estimé que les établissements bancaires auraient dû détecter des anomalies manifestes dans les virements effectués vers des plateformes listées par l’AMF. Dans ces cas, les remboursements peuvent atteindre 50 à 70 % des montants perdus.
🔹 Exemples clés :
L’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 28 mai 2025 (n° RG 24/02.899) a retenu la responsabilité de la banque, le virement litigieux ayant été réalisé au profit d’un prestataire inscrit sur liste noire. La banque aurait dû réagir.
A Toulouse (CA 2e ch., 17 sept. 2024, n° RG 22/03257), une cliente avait réalisé 28 virements en six mois. Le caractère inhabituel et massif des mouvements, couplé à l’inscription sur liste noire du bénéficiaire, a conduit à une condamnation de la banque pour un montant de 46.500 €.
🔹 Des décisions favorables… mais au cas par cas
Toutes les victimes n’obtiennent pas gain de cause. Le succès d’une action dépend de la capacité à démontrer une anomalie visible et grave : montants anormalement élevés, fréquence inhabituelle des opérations, dépassement de plafond, etc.
Par exemple, dans une affaire jugée à Montpellier (TJ, 12 décembre 2024, n° RG 21/00303), la banque a été condamnée à rembourser 75 % des pertes après plusieurs virements suspects vers l’étranger totalisant 60.000 € en six mois.
À l’inverse, la Cour d’appel de Rennes (CA, 20 mai 2025, n° 23/00.618) a rejeté une demande, illustrant l’importance du contexte.
🔹 Des limites juridiques à connaître
Il est important de souligner que la responsabilité des banques ne peut être engagée sur le fondement du dispositif LCB-FT (lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme), comme l’a rappelé la Cour de cassation le 28 avril 2024 (n° 02-15.054).
Il est important de souligner que le consommateur n’obtient pas gain de cause lorsqu’il évoque la responsabilité de la banque sur le dispositif LCB-FT (lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme), comme l’a rappelé la Cour de cassation le 28 avril 2024 (n° 02-15.054).
De même, l’argument selon lequel l’épargnant serait « non averti » ne suffit pas à lui seul à justifier une indemnisation. Il faut des faits concrets, visibles et décelables par une banque attentive.
🔹 Informer sa banque, un réflexe prudentiel
Souvent, les victimes n’avertissent pas leur conseiller bancaire de leurs investissements en cryptomonnaies. Ce silence complique la mise en cause de l’établissement en cas de fraude. Il est donc recommandé de notifier ses intentions à sa banque, afin de poser un cadre et d’anticiper toute anomalie potentielle.
🔹 Des victimes de plus en plus diverses
Ce ne sont plus uniquement les profils technophiles ou les investisseurs aguerris qui tombent dans le piège. Aujourd’hui, des retraités, cadres supérieurs ou familles modestes engagent des sommes parfois considérables… et subissent de lourdes pertes. Certains, par honte, renoncent même à intenter une action.
🔹 Une vigilance essentielle dans un écosystème trompeur
Les cryptomonnaies se banalisent : publicité dans les transports, vidéos virales, messages séduisants sur les réseaux… Mais dans les faits, les réussites sont rares et les échecs fréquents. Derrière quelques récits de fortunes éclairs, on trouve des milliers de personnes ayant tout perdu.
À retenir : le fantasme du jackpot cache souvent une réalité bien plus sombre. Si une offre semble trop belle pour être vraie… c’est probablement le cas.