Limiter la viande, manger des légumineuses, privilégier le bio… une étude confirme qu’adopter un régime plus en concordance avec les nouvelles recommandations nutritionnelles françaises est bénéfique pour la santé et l’environnement. Sauf que les Français en sont loin. Il faut dire qu’en plus de nécessiter du temps en cuisine, l’étude révèle que le régime préconisé par les autorités de santé implique un surcoût non négligeable.
35 000 morts prématurées évitées chaque année, un impact environnemental diminué de moitié, mais aussi une dépense supplémentaire de 91 centimes par jour et par personne. Voilà ce que seraient les conséquences de l’adoption, par l’ensemble de la population française, d’un régime plus proche des nouvelles recommandations nutritionnelles des autorités de santé, révélées début 2019 (voir encadré).
C’est en tout cas la conclusion (1) d’une équipe de chercheurs (dont plusieurs avaient participé à l’élaboration de ces nouvelles recommandations) qui ont étudié le régime alimentaire de près de 30 000 français. Pour y arriver, les scientifiques ont comparé l’alimentation des 20 % d’entre eux qui s’approchaient le plus du régime préconisé, et celui des 20 % les plus éloignés, puis ont estimé le coût et les impacts sanitaires et environnementaux de chacun de ces régimes. Résultats du régime alimentaire du groupe des « bons élèves » : beaucoup moins de risques de maladies cardiovasculaires, mais aussi d’émissions de gaz à effet de serre, d’épuisement des ressources et d’occupation des sols.
Cela n’a certes rien de très surprenant, puisque c’est dans ce but qu’ont été élaborées ces recommandations. En effet, pour la première fois, en France, et comme dans plusieurs autres pays déjà, les recommandations nutritionnelles visent à protéger, non plus seulement la santé publique, mais aussi l’environnement. « C’est important de valider et surtout de chiffrer l’impact », justifie cependant Emmanuelle Kesse-Guyot, chercheuse en épidémiologie nutritionnelle à l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) et première auteure de l’étude.
Surcoût de 110 € par mois pour une famille de 4
Ses travaux apportent de plus d’autres enseignements intéressants. D’abord, ils révèlent que les 20 % de personnes dont le régime s’approche le plus des recommandations des autorités de santé dépensent chaque jour, pour leur alimentation, 91 centimes d’euros de plus que les 20 % qui en sont les plus éloignés. Soit une différence de 110 € par mois pour une famille de 4… « Nous n’avons pas pu le démontrer, mais je pense que c’est parce que les personnes qui suivent les nouvelles recommandations mangent plus de bio », explique Emmanuelle Kesse-Guyot, qui tient à préciser que « les recommandations stipulent qu’il est bon de privilégier le bio quand on le peut ».
Est-ce pour cela que les recommandations nutritionnelles sont si peu suivies ? L’étude montre en tout cas que même les « bons élèves » sont encore loin du compte, avec en moyenne un score d’adhérence aux recommandations nutritionnelles de 3,8 points sur 14,25 pour les 20 % de femmes qui se nourrissent le mieux, et de 2,3 pour les 20 % d’hommes au régime le plus équilibré. « Ce n’est pas simple de faire bouger les habitudes alimentaires », reconnaît Emmanuelle Kesse-Guyot. Cette dernière prévient d’ailleurs : « Ce sera un travail de longue haleine… »
Rappel des nouvelles recommandations nutritionnelles
Augmenter
- Les fruits et les légumes
- L’activité physique
- Le fait maison
- Les légumes secs : lentilles, haricots, pois chiches, etc.
- Les fruits à coque
Aller vers
- Les aliments bio
- Les aliments de saison et les aliments produits localement
- Une consommation de poissons gras et maigres en alternance
- Le pain complet ou aux céréales, les pâtes et le riz complets, la semoule complète
- L’huile de colza, de noix et d’olive
- Une consommation de produits laitiers suffisante mais limitée
Réduire
- La viande (porc, bœuf, veau, mouton, agneau, abats)
- Les produits sucrés et les boissons sucrées
- La charcuterie
- L’alcool
- Le temps passé assis
- Les produits salés
- Les produits avec un Nutri-Score D et E
Source : Santé publique France
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(1) https://www.nature.com/articles/s41893-020-0495-8?proof=trueMay%25252F (payant, en anglais)
Elsa Abdoun