Après deux ans de pandémie, les industries agroalimentaire et agrochimique ont à nouveau pu entonner, Porte de Versailles, leurs « éléments de langage » préférés. Que Choisir s’y est frotté… jusqu’à l’écœurement.
Écourté en 2020, annulé en 2021, le Salon international de l’agriculture faisait son grand retour en 2022. Avec, cette année encore, son traditionnel lot de grignotages réjouissants, bêtes de concours épatantes et désinformation scandaleuse.
Au menu, pour commencer : dégustation de crêpe bretonne devant le stand de l’interprofession des semenciers, où l’on apprenait qu’il « n’est pas démontré qu’une assiette bio a un impact environnemental plus intéressant qu’une assiette conventionnelle » (alors même que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat classe le bio ‒ contrairement à l’agriculture conventionnelle ‒ parmi les modes de « gestion et utilisation responsables des ressources en terres, eau, animaux et végétaux »).
Ensuite, difficile de ne pas craquer pour les appétissants beignets préparés, sur le stand de la filière betterave à sucre, par un chef cuisinier expliquant que « le sucre est naturellement blanc et n’a donc pas besoin d’être raffiné » et que « sa production est naturelle » (sa fabrication nécessite en réalité plusieurs étapes de transformation, pouvant elles-mêmes impliquer l’emploi de nombreuses molécules de synthèse).
Recommandations imaginaires…
Au matin du cinquième jour, direction le stand de l’Aveyron où, après avoir tâté la croupe de jolies montbéliardes, le visiteur curieux pouvait entendre Sébastien Vignette, secrétaire général de la Confédération générale de Roquefort, expliquer que « les Français consomment en moyenne 30 grammes de fromage par jour, ce qui est précisément la portion recommandée » (les agences de santé publique n’ont en réalité jamais émis une telle recommandation).
Puis, après une halte au stand de l’interprofession des vins français, où l’on aura dégusté de bons petits crus « avec modération » (on hésiterait presque à se resservir, puisqu’un écran tactile nous rappelle que « ce n’est que du raisin »), direction le stand d’Interbev (l’interprofession du bétail et des viandes), où des animateurs juchés sur des estrades encensent, devant un parterre d’enfants attentifs, les bons traitements réservés aux animaux d’élevage, tandis que des parents malins font le plein de livrets de recettes présentées comme « flexitariennes » (mais contenant toutes de la viande).